S’il y a un Everest parmi les sommets en termes de branding, c’est bien celui de parvenir à installer sa marque grâce à un signe unique reconnaissable de tous et sans que le nom de celle-ci n’y figure en toutes lettres…
Naturellement on pense immédiatement à Nike et à sa virgule (ou « Swoosh ») imaginée en 1971 par Carolyn Davidson, étudiante en graphisme qui a réalisé le logo et son signe iconique, pour la modique somme de 35 US Dollars ! Pour la petite histoire, Nike la remerciera bien plus généreusement quelques années plus tard.
Mais tout aussi spontanément, d’autres success stories s’imposent, comme Apple et sa pomme croquée (1977 par Rob Janoff) ou Lacoste et son célèbre crocodile dessiné en 1926 par Robert George. Mais après ?
MasterCard vient de choisir à son tour le côté lumineux de la force en décrétant début 2019 que son logo se passerait du nom de la marque. Une petite folie à laquelle peu d’élus se risquent, car comme le souligne Raja Rajamannar, directeur marketing de Mastercard, « Il faut faire attention à ne pas être arrogant et dire ‘je suis iconique, je laisse tomber le nom de ma marque ». Mastercard a mené pendant près de deux ans des études partout dans le monde pour s’assurer que sa marque resterait identifiable sans son nom !
Car ce sont les publics de la marque qui d’une certaine manière « valident » la pertinence de cette audacieuse approche — ou non ! —, en avouant (les millenials « avouent » souvent ;), que le signe leur parle suffisamment et qu’ils n’ont plus besoin de sous-titre !
Mais attention, il ne s’agit pas de s’assurer que les clients identifient le signe, ce serait bien trop facile car ils ont a priori déjà été « approchés » et ont vécu une expérience avec la marque à travers l’acte d’achat et la phase de séduction qui a pu opérer en amont. Il faut surtout convaincre ceux qui ne sont pas encore client et qui potentiellement aimeraient que le signe cabalistique sans nom appartiennent dorénavant à leur univers.
Mais encore ?
Parmi les grandes marques qui jouent à cela depuis belle lurette, n’oublions pas les constructeurs automobiles, qui grâce à leurs calandres historiques ont su installer cette idée d’emblème « reconnaissable de loin ». Qui a mis en place un losange, qui un lion, qui 4 anneaux, qui deux W entrelacés, qui un taureau (japonais) ou un « T ». Même si toutes les marques de voitures ne viennent pas immédiatement à l’esprit en termes d’emblème : dessinez donc celle de Fiat, de Chrysler ou d’Alfa Romeo ! !
Et avant ?
Il y a fort fort longtemps, tandis que j’usais mes jeans 501 sur les bancs de l’ENSAD, la révélation sur ce concept de « signe iconique » non religieux m’était apparu dans les mots du talentueux Gérard Caron, Co-fondateur de l’agence Carré Noir, qui nous avait expliqué très calmement que le concept de logotype n’avait pas été inventé au XXe siècle par Henri Ford ou Hoover pour signer leurs premiers produits dits « de masse ».
Mais qu’il fallait remonter au Moyen-Âge pour distinguer dans le lointain de la plaine ce signe de reconnaissance décliné déjà à l’époque — et sans plateforme de marque ! — sur un étendard, un bouclier ou la tunique d’un chevalier les « armes » de la maison que chacun de ces signes représentaient. Et qu’on retrouvait gravé dans la porte ou la pierre des châteaux, sur le bois des coffres ou sur une chevalière.
Blind test
Plus de 15
si vous gravitez dans l’univers de la communication
et que vous disposez d’une bonne mémoire visuelle,
le 20 sur 20 est à votre portée!
Entre 10 et 15
l’identité de marque n’est pas votre sujet de prédilection,
car peut-être vous préférez les mots aux images ?
C’est tout à fait respectable.
Moins de 10 ?
Aïe! Laissez-nous deviner… Vous arrivez d’une autre planète? Vous êtes mineur ? Vous n’avez jamais ouvert un magazine?
Vous traversez les villes sans jamais lever le nez, les yeux rivés sur votre partie de Candy Crush.
Dans tous les cas, confiez-nous votre marque, nous en prendrons le plus grand soin!